Dimanche 9 juin, pour la première fois, la banlieue parisienne s’est parée des couleurs de l’arc-en-ciel. Afin de lutter contre l’homophobie et la stigmatisation des habitants du 93, plus de mille personnes ont défilé dans les rues de Saint-Denis. Une marche LGBTQ qui a démarré en début d’après midi dans le centre ville, suivi d’une soirée mêlant performances et concerts, sans la moindre violence.
La banlieue ne peut plus y échapper. Pendant des années, le département du 93 a été mis à l’écart des défilés aux couleurs « Queer ». Jusqu’à ce dimanche 9 juin, où pour la première fois, des centaines de personnes ont fièrement représenté la communauté LGBTQ des quartiers de Saint-Denis.
« Des agressions qui ont lieu ici et ailleurs »
« La visibilité est essentielle dans le combat contre l’homophobie. Pour cette raison, arborer à Saint-Denis le drapeau arc-en-ciel, symbole de l’émancipation des LGBT, c’est fondamental », déclare Joël Deumier, co-président de SOS Homophobie, présent lors de la marche.
Mais pour Yanis Khames, organiseur du défilé, il était surtout primordial de rappeler que cette homophobie « existe ici et ailleurs ». Le jeune homme de 20 ans explique : « Par le fait même qu’on vit en banlieue, on est ramenés au fait qu’on est pauvres, qu’on est racisés, qu’on est immigrés, en plus du fait d’être homosexuels ».
Ces stéréotypes, qui nourrissent le clivage Paris vs Banlieue, doivent être déconstruit selon Luca Poissonnet, co-fondateur de l’association « Saint-Denis ville de cœur » : « Le discours majoritaire sur l’homophobie en banlieue n’est pas un discours contre l’homophobie, mais contre les habitants de banlieue supposés LGBTQIphobes ». Or, pour ces deux actifs de la cause LGBTQ, la banlieue est bel et bien un lieu de militantisme au même titre que le reste du territoire national.
La municipalité communiste a d’ailleurs soutenu l’événement et a habillé pour l’occasion la mairie d’un drapeau aux couleurs de l’arc-en-ciel. Saint-Denis disposait déjà d’un passage piéton multicolore, qui « contrairement à Paris, n’a jamais été dégradé », souligne Luca Poissonnet.
Un défilé sans violence
En 2018, selon un rapport dévoilé en mai dernier par SOS Homophobie, les agressions à caractère homophobe ont atteint un niveau jamais égalé en France, avec 231 agressions recensées ; contre 188 cas en 2013.
Malgré ces chiffres et de potentielles appréhensions, cette marche du 9 juin s’est déroulée sans la moindre violence : « Personne n’est venu nous emmerder », raconte Youcef. Selon ce manifestant, si des événements similaires à ceux qui avaient eu lieu mi-mai en Vendée (un stand LGBTQ a été vandalisé) s’étaient produits ce 9 juin « en banlieue, on en aurait entendu parler pendant des siècles ».