Il n’est pas toujours évident de trouver un bon coiffeur. Pour cause, depuis quelques années, cette filière connaît un réel désamour et semble menacée. Pour redorer le blason d’un artisanat historique, L’Oréal crée un nouveau bachelor coiffure et entrepreneuriat d’excellence au sein même du groupe.
Un secteur sur la pente descendante
Avant les années 1990, il était encore facile de faire fortune en étant coiffeur. Jean-Marc Maniatis, Franck Provost, Jean Louis David… ces noms vous disent quelque chose ? Ces Français devenus stars planétaires sont des coiffeurs reconnus dans le monde entier. Seulement voilà, la décennie 90 a vu naître les nouvelles coupes « faciles » : dégradés, coiffés décoiffées qui règnent encore aujourd’hui sur les tendances. Internet, vidéos YouTube et autres services à domicile sont également apparus et les femmes vont beaucoup moins chez le coiffeur. Depuis 2011, le secteur de la coiffure affiche même une courbe décroissante.
Les bons professionnels de plus en plus rares
En France, sauf peut-être à Paris où les coiffeurs « branchés » font encore recette, les bons professionnels se font de plus en plus rares et l’on compte pas moins de 10 000 postes vacants. Comme le précise Marisol, coiffeuse à Paris et spécialiste de la coupe sur cheveux secs : « La crise de cette profession est le résultat de plusieurs phénomènes. D’abord l’enseignement n’a pas évolué depuis les années 1950 : on apprend encore la chimie, comment faire une permanente… Des notions théoriques et obsolètes à l’heure où l’on ne parle que de coloration végétale, de coiffeur studio ou de hair stylist de cinéma ! Ensuite, les jeunes qui sortent de l’école, déjà peu motivés, se retrouvent apprentis dans des salons où on leur demande souvent de faire exclusivement le ménage. Enfin, il y a le problème des grandes enseignes, qui privilégient la rapidité de coupe et le talent commercial à vendre des produits plutôt qu’un sens artistique. La motivation de plusieurs générations de coiffeurs a été sacrifiée à cette machine. Aujourd’hui les clientes, de plus en plus exigeantes, poussent la profession à se remettre en question. »
La nouvelle tendance des réseaux sociaux
En 2019, la tendance est à la coupe naturelle, aux couleurs fondues et au brushing « ni lisse, ni bouclé ». « Nous étions loin de nous y attendre et, pourtant, le digital a chamboulé ce secteur » souligne Nathalie Roos, directrice générale de la division produits professionnels de L’Oréal. Elle ajoute : « Avant les réseaux sociaux, la coiffure était un monde vertical : L’Oréal lançait une tendance ou une technique inédite, les coiffeurs étaient formés et la cliente découvrait en salon. Désormais c’est l’inverse qui se produit, et certains professionnels ne suivent pas. »
Un marché en quête d’adaptation
Le marché de la coiffure doit donc apprendre à s’adapter, comme beaucoup d’autres artisanats de son temps. C’est pourquoi le groupe vient d’annoncer l’ouverture d’une école dédiée aux métiers de la coiffure qui prendra place dans le XIVe arrondissement de Paris ainsi que la création du premier bachelor coiffure et entrepreneuriat. La première promotion devrait voir le jour en Janvier 2020. « Nous voulons créer une filière d’excellence attractive pour les nouvelles générations en proposant une formation complète qui enseigne non seulement la maîtrise technique, mais aussi des compétences transverses en entrepreneuriat et digital, reprend Mme Roos. Notre ambition est d’offrir aux jeunes talents de la coiffure de demain l’ensemble des outils nécessaires pour innover. »
Le parcours durera trois années et est ouvert aux titulaires d’un CAP, mais aussi à des bacheliers de moins de 29 ans en reconversion. 150 étudiants seront sélectionnés pour apprendre les bases du métier, mais également comment monter leur affaire, faire leur publicité sur Instagram, gérer leur clientèle et… faire la conversation ! L’année devrait coûter environ 10 000 euros/an.