La situation que nous vivons est inédite. Nous avons tendance à l’oublier, portés par les journées qui se suivent et se ressemblent, mais nous n’avions encore jamais connu de telles mesures dans l’histoire moderne de notre pays. C’est pourquoi de nombreuses organisations ont décidé de rassembler dessins, masques et récits de confinement. L’objectif ? Constituer une mémoire pour les futures générations.
Construire la mémoire
Le Mucem de Marseille, les archives départementales des Vosges et de nombreuses autres institutions récoltent en ce moment même divers témoignages qui relatent les mésaventures de ces temps troublés. Les différentes archives de France appellent donc les citoyens français à leur envoyer textes, dessins, photos et même des vidéos par mail ou par courrier. L’objectif : construire une mémoire de la période que nous vivons.
La mémoire s’en va vite
Ce sont les archives départementales des Vosges qui ont lancé l’idée sur les réseaux sociaux, en même temps que les archives de Beaune, le 18 mars dernier. Comme l’explique François Petrazoller, chef des archives vosgiennes à l’AFP : « On a un rôle à jouer, celui de conserver la mémoire ». Il ajoute également avoir voulu « lancer l’appel tout de suite, car la mémoire s’en va vite. Quand il y a un événement traumatique, les gens ont vite un prisme et ils ne gardent que le très angoissant ou le très rassurant ». Pour rappel, après les attentats de novembre 2015, les archives de Paris avaient également récolté des témoignages, directement dans la rue.
De nombreuses personnes ont déjà contribué à cet effort de mémoire. Dans de nombreux départements, en Mayenne, en Seine-Maritime, dans le Gard ou encore dans l’Aube, des écrits, des photos et des vidéos ont déjà été rassemblés en grand nombre. Après lecture de ces quelques témoignages, François Petrazoller souligne alors que « l’angoisse est bien présente ».
Une collection d’objets du confinement
Pour aller encore plus loin, le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée de Marseille souhaite rassembler une collection d’objets usuels ou fabriqués qui servent pendant le confinement : masques en tissus, ustensiles de cuisine ou encore lettre anonyme évoquant la peur et l’isolement. Caroline Wahl, responsable des archives de l’Isère abonde dans ce sens « On veut des témoignages sur le vif, la vie de tous les jours, avec sa routine, qui donne de la chair par rapport aux archives officielles du gouvernement ».
Et ce qui est sûr, c’est que les premières collectes rassemblent déjà quelques perles ! On retrouve par exemple une photo d’un mur grenoblois sur lequel est inscrit en lettres rouges : « le confinement s’est chiant! » (sic). Également deux poèmes d’écolier de 7 et 9 ans. Babete Largo, une artiste en résidence aux archives, tente même de fabriquer une bande originale du confinement : clavier d’ordinateur d’un poste de télétravail, rire d’un enfant…
Créer une mémoire sociale
Il semble donc important de rassembler ces souvenirs pour créer cette mémoire. Une mémoire sociale comme l’appelle l’historienne Annette Becker : « La mémoire est sociale; on ne peut pas se rappeler tout seul. On se rappelle bien de manière sociale et dans le temps. La mémoire se transforme constamment selon ce qui survient chaque jour ».