Au début du mois de septembre, nous avons eu la chance de rencontrer Mathilde Castres, Présidente de l’association TU VIS TU DIS ! Une association qui lutte pour que notre société devienne plus bienveillante envers les femmes et pour que les rapports entre les sexes soient plus respectueux. Samedi 19 octobre prochain, elle organise une course de running pour la deuxième année consécutive, l’occasion pour nous d’en apprendre un peu plus sur cet évènement et sur l’association en général.
Métropolitaine : Pourriez-vous nous décrire exactement en quoi consiste la SINE QUA NON RUN et les SINE QUA NON SQUAD ? Quels sont les objectifs de la course SINE QUA NON RUN ?
Mathilde Castres : « La Sine Qua Non Run, est une course de running créée l’année dernière, un an après le lancement du mouvement #MeToo. Elle se déroule au cœur du Parc de La Villette. Il s’agit d’une course de 6 et 10 km ouverte aux femmes et aux hommes dont l’objectif est de montrer que la société est prête à évoluer vers plus d’égalité et de respect. Cette course, c’est aussi la volonté de redonner au mot NON tout son sens, son poids, sa force… un message adressé à chacun pour dire que “NON une femme ne doit pas avoir peur de courir seule”, “de prendre les transports”, “de mettre une jupe”, “de repousser des avances”… que ce non soit entendu, respecté et compris, car c’est la condition SINE QUA NON pour une société respectueuse.
Nous avons choisi de la faire en fin de journée pour nous réapproprier l’espace public dans les moments où l’on se sent davantage menacés. À la suite de cette première édition, nous avons reçu de nombreux témoignages de runneuses partageant à la fois leur crainte de courir seule tôt le matin ou tard le soir, et leurs agacements à faire l’objet de remarques sexistes notamment lorsqu’elles courent en short ou en brassière. Nous avons donc lancé les Sine Qua Non Squad tout au long de l’année !
Depuis janvier nous invitons également les femmes et les hommes à intégrer les “SINE QUA NON SQUAD” à la tombée de la nuit pour des sessions Run&Train. Nous changeons de lieux chaque mois et investissons les terrains où nous n’osons pas aller habituellement. L’objectif de ces sessions est avant tout de se réapproprier l’espace public et de s’affirmer. Nous revendiquons le droit à pouvoir faire du sport où nous souhaitons, quand nous souhaitons et dans la tenue que nous voulons. »
#SineQuaNonRun – 19/10 – @LaVillette
👟6 ou 10km pour celles et ceux qui trouvent inacceptable qu’une femme ne puisse sortir, faire du sport, prendre les transports sans craindre sexisme, harcèlement ou pire !
💜 bénéfices reversés @lamaisondfemmes @Fight4Dignity_ @ParlerAsso pic.twitter.com/kCg0hXEAvl
— Tu vis ! Tu dis ! (@Tu_vis_Tu_dis) July 31, 2019
Métropolitaine : Quel est le rôle de l’association « TU VIS TU DIS » dans cet évènement ?
M.C. : « Notre association est née de la rencontre de 3 générations de femmes, qui après avoir été confrontées de près ou de loin à l’agression sexuelle, ont souhaité mettre fin à l’omerta qui existait et agir pour promouvoir une nouvelle société bienveillante, avec des rapports respectueux entre hommes et femmes. Pour cela, nous avons choisi comme moyen d’intervention le sport, formidable outil au service de la confiance et de l’affirmation de soi. Nous organisons aujourd’hui plusieurs types de manifestations sportives (autour du running et du football) dont la vocation est de lutter contre toutes les formes de violences faites aux femmes, mais aussi de changer collectivement et en profondeur certains comportements violents, déviants, parfois banalisés, qui ne sont tout simplement plus tolérables au 21e siècle dans nos sociétés. L’ensemble des bénéfices lié à ces actions est reversé à des associations qui accueillent, accompagnent, réparent et aident les femmes victimes. »
Métropolitaine : Comment expliquer cette peur des femmes de courir seules le soir ?
M.C. : « Une étude menée en 2015 par Runner’s World révélait que 43 % des femmes se disent victimes de harcèlement durant leur séance de footing et 27 % des femmes ont tout simplement arrêté la course à pied pour cette raison. Le harcèlement de rue pour les runneuses et bien réel et le soir on se sent plus vulnérables et menacés.. Il y a moins de monde, on peut être isolé, et si on est confronté à ce type de situation il peut être plus difficile d’être aidé. Or bien souvent l’envie ou le besoin de courir se fait sentir à la fin de sa journée de travail, à la tombée de la nuit. On ne devrait pas avoir à se poser ce type de questions, mais au contraire pouvoir courir quand on le souhaite ! »
Métropolitaine : Pourquoi pensez-vous que le sport se présente comme un bon moyen de lutter contre les violences faites aux femmes ?
M.C. : « Construire une société plus égalitaire (ce qui signifie sans violence faite aux femmes) passe par la réappropriation de l’espace public par les femmes. Le sport, par sa capacité à être un formidable outil au service de l’affirmation de soi, de la prise de leadership et de la confiance doit être une solution dans cette conquête et non une source de craintes ou une énième opportunité d’injonction sur la place des femmes. De plus le sport est un formidable moyen de mobilisation de la société civile. Nous pouvons mobiliser et toucher toutes les CSP, les âges… C’est le seul levier qui a cette force universelle. »
Si vous souhaitez vous inscrire à la course, il n’est pas trop tard ! C’est par ici que ça se passe.