Il est évident, que le féminisme a le vent en poupe, il est tendance, on va dire tout simplement qu’il est à la « mode ». Alors, que ce soit de manière sincère ou plus particulièrement intéressée, il fait vendre. C’est pour cela, que nous voyons des vêtements ornés de messages pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les rayons. Toutes les enseignes de prêt-à-porter, y vont de leurs slogans. Si on est ravi de cette prise en compte d’une situation parfois intolérable, il est à craindre qu’une utilisation trop mercantile du sujet, le dénature rapidement.
On peut multiplier les exemples de cette tendance comme la marque espagnole Zara et son t-shirt « We React » qui donne “nous réagissons » en français, River Island avec un message simple, sobre, mais très clair, « Féministe ». On pourrait compléter par, Mango ou encore & Other Stories, un magasin du groupe H&M. Même une enseigne comme Monoprix suit ce phénomène. La nouvelle collection de Monoprix, surfe sur cette gamme « féministe » avec plusieurs types de produits, qui vont du t-shirt, aux coussins et des mugs. Les vêtements et accessoires s’adressent aux femmes, aux enfants, mais aussi aux hommes.
En amont de ces réactions, il y a eu des prises de position plus pionnières en la matière, de certaines marques de luxe comme Stella McCartney, Off-White, Zadig & Voltaire. Maintenant, tout le monde s’engage peu ou prou dans la brèche. La chroniqueuse mode Madeleine Goubau, fait remarquer que l’arrivée à la présidence des États-Unis, de Donald Trump avec son cortège de prise de position et de tweets bien relevés, a accéléré le mouvement aux Etats-Unis, et par conséquence dans le monde. Elle dit “beaucoup de designers, dans leur défilé, ont pris position sur des sujets comme le féminisme et l’immigration en créant des t-shirts à slogan« .
De son côté, la porte-parole de l’association Osez le féminisme Céline Piques, nous fait part d’un certain scepticisme sur toute cette tendance. Elle prend, bien sûr acte de la vision plus positive que prend le terme féminisme avec le soutien des grandes marques. Elle explique dans le Huffpost, « le terme féminisme a longtemps pâti d’une connotation pessimiste, renseigne la militante. C’était limite une insulte, mais grâce à cette utilisation par des marques grand public, ou des célébrités comme Beyoncé et Rihanna, le mot a retrouvé ses lettres de noblesse auprès d’une large audience.
Hélas, comme souvent, il y a un prix à payer pour cette mise sous les projecteurs de cette cause. « Cette tendance se fait à titre commercial« , estime Céline Piques. On se rappelle des critiques qui avaient été formulées lors de la commercialisation d’un t-shirt blanc de la marque Dior, orné de la phrase de l’écrivaine nigériane Chimamanda Ngozi Adichie « We should all be feminists » (en français, « nous devrions tous être féministes ». La directrice artistique de l’enseigne de luxe, a précisé qu’un pourcentage des ventes avait été reversé à l’association caritative de Rihanna dédiée à l’éducation. Cependant, cela n’a semble-t-il pas été clairement prouvé.
Il faut aller bien au-delà des aspects financiers pour le mouvement Osez le féminisme. Il n’est pas question de réduire les questions liées aux femmes à de simples slogans sur des vêtements qui s’en iront, quand ceux-ci ne seront plus à la mode. Les choses doivent être traitées avec plus de profondeur. Céline Piques insiste, « on a toujours des jouets genrés, du rose pour les filles et du bleu pour les garçons« .
Aller plus loin, c’est par exemple, une réflexion de ces marques sur leur propre fonctionnement. Il n’est pas sûr, par exemple que toutes les entreprises qui font des t-shirts avec inscrit « féministe » dessus pratique une simple parité homme-femme basique dans les emplois.
Il en est de même pour nous tous, avant d’afficher des slogans à l’intention du monde entier, contentons-nous parfois d’agir concrètement dans un petit périmètre autour de nous, ce sera déjà pas mal.
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