Livre d’occasion : bientôt un droit de suite au droit d’auteur ?

Bientôt un droit de suite au droit d’auteur sur le livre d’occasion ? Lors du Festival du Livre de Paris, le ministère de la culture a évoqué cette possibilité. Cette solution juridique permettrait aux éditeurs et aux auteurs d’être rémunérés lors de la revente d’un ouvrage. Mais un tel droit pourrait donner des idées à d’autres secteurs.

À l’occasion du Festival du Livre de Paris, le ministère de la culture a annoncé que Rachida Dati comptait saisir le Conseil d’État afin de mettre en place un « droit de  au droit d’auteur », s’appliquant lors des différentes ventes d’un livre d’occasion. Cette solution juridique permettrait aux éditeurs et aux auteurs d’être rémunérés pour chaque achat d’un même volume. Cette taxe constituerait une source de revenus supplémentaires pour ces auteurs, alors que les ventes du livre d’occasion progressent plus vite que celles du neuf.

Le livre d’occasion progresse en France 

Selon une étude inédite sur le marché du livre d’occasion en France, menée en 2022 par le ministère de la Culture et la Société française des intérêts des auteurs de l’écrit (SOFIA), un livre acheté sur cinq en France est un livre d’occasion. Mieux, la part de marché du livre d’occasion progresse peu à peu chaque année, pour atteindre en 2022 près de 20 % des livres achetés. Mais le secteur représente moins de 10 % de la valeur du marché. Toutefois, il est amené à prendre de l’ampleur dans les prochaines années, grâce à un prix plus accessible.

4 Français sur 10 revendent leurs livres neufs

Si le marché du livre évolue sans cesse, c’est aussi parce qu’il est de plus en plus simple de revendre ses livres. Aujourd’hui, 4 Français sur 10 revendent leurs livres qui deviennent des livres d’occasion sur des plateformes en ligne comme Recyclivre, Rakuten, Momox ou encore Vinted. Ces sites proposent de plus en plus systématiquement des livres d’occasion aux clients. Ils s’ajoutent aux plateformes qui proposent la vente en ligne entre consommateurs eux-mêmes, tel que Leboncoin.

Le livre d’occasion ne rémunère pas les auteurs 

Si la croissance du marché du livre d’occasion peut réjouir les écologistes, elle peut représenter un problème pour les éditeurs et les auteurs. En effet, ceux-ci ne perçoivent aucun centime de droit d’auteur sur leurs ouvrages revendus, alors qu’ils font déjà face à des difficultés financières. Pour leur venir en aide, Emmanuel Macron avait évoqué, lors de sa venue au Festival du Livre 2024, la possibilité d’une « contribution » des revendeurs de livres d’occasion pour la filière, sans en donner la forme précise.

Une mesure pour répondre au souhait d’Emmanuel Macron 

L’annonce du ministère de la culture d’un droit de suite du droit d’auteur vise donc à répondre au souhait du chef de l’État. Dans un communiqué, le ministère a précisé que « le produit de ce droit d’auteur sur le livre d’occasion serait reversé à un organisme de gestion collective au bénéfice du soutien à la création ». Pour le président du Syndicat national de l’édition, Vincent Montagne, cette mesure « satisfait » les acteurs de l’édition. Il estime que la France doit montrer la voie sur une juste rémunération des auteurs, après avoir été le premier pays à imposer la loi sur le prix unique du livre.

Un droit de suite pour sanctuariser le prix du livre d’occasion 

En 2024, Emmanuel Macron avait justement déclaré que « le livre d’occasion, quand il est fléché par certaines plateformes » représente « une espèce de mauvais usage, de contournement de ce prix unique ». Toutefois, si une juste rémunération des auteurs et autrices (littéraires, scientifiques, etc.) s’impose, le droit de suite du droit d’auteur pourrait poser quelques problèmes juridiques. En effet, une directive européenne et sa transposition dans le droit français interdisent d’exercer un droit sur l’objet-livre, dès lors qu’il a été vendu officiellement une première fois.

Le traitement du livre d’occasion pourrait donner des idées à d’autres secteurs 

Par ailleurs, le droit de suite du droit d’auteur peut prêter à des parallèles, que certains trouveront certainement cocasses. Comme par exemple un dispositif qui permet aux groupes automobiles de revendiquer une part dans la revente de leurs véhicules par des concessionnaires, ou un autre qui autorise les marques de textile à demander une taxe sur la revente de vêtements de seconde vie sur les boutiques en ligne. On pourrait enfin s’interroger sur le message envoyé au secteur de la seconde main, qui réduit pourtant la surpublication d’ouvrages. Il faudrait donc réfléchir à un meilleur dispositif pour aider les auteurs et autrices.

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