Un des plus grands mystères de l’histoire de l’art serait-il en passe d’être résolu ? Les experts annoncent être sûrs à 99 % que le modèle ayant posé pour la peinture L’Origine du monde était la danseuse de ballet parisienne Constance Queniaux.
La toile du peintre Gustave Courbet n’arrête pas de surprendre, voire de choquer. Pour rappel, jusqu’en 2011, Facebook censurait tous les utilisateurs qui l’utilisaient en photo de profil. C’est pourquoi la découverte de son modèle original permet de mettre un point final à un véritable mythe artistique.
Depuis des dizaines d’années, les historiens de l’art sont convaincus que le buste et le vagin représentés sur la peinture appartiennent à la maîtresse de Courbet, l’Irlandaise Joanna Hiffernan. Mais le doute persiste, principalement à cause de la couleur des poils pubiens qui ne correspondent pas aux boucles rousses flamboyantes qu’arborait Hiffernan.
Constance Queniaux, ancienne danseuse de l’Opéra
C’est au cœur de la correspondance entre les écrivains Alexandre Dumas fils et George Sand que le mystère s’est résolu. Désormais disponibles, leurs échanges désignent Constance Queniaux, une ancienne danseuse de l’Opéra de Paris comme pouvant être ce fameux modèle.
Constance Queniaux était une des maîtresses du diplomate ottoman Halil Şerif Pacha — alias Khalil Bey — lorsque le tableau a été réalisé durant l’été 1866. Et c’est Halil qui a commandé cette toile à Courbet pour sa collection personnelle de peintures érotiques. C’est en parcourant les copies des lettres de Dumas que l’historien français Claude Schopp a découvert le lien avec Queniaux.
Un passage en particulier, datant de juin 1871, l’a rendu perplexe : « On ne peint pas de son pinceau le plus délicat et le plus sonore l’interview de Mlle Queniault (sic) de l’Opéra ». C’est en consultant l’original qu’il découvre cette coquille de transcription, le mot « interview » étant en fait « intérieur ». « Ce fut comme une illumination », se souvient Claude Schopp. « D’habitude je trouve en travaillant beaucoup, là j’ai trouvé sans chercher. »
Les experts convaincus à 99%
Schopp fait rapidement part de sa découverte à Sylvie Aubenas, directrice du service des estampes de la Bibliothèque nationale de France, également convaincue que Queniaux était le modèle. « Ce témoignage de l’époque me porte à croire avec 99 % de certitude que le modèle de Courbet était Constance Queniaux », a-t-elle déclaré à l’Agence France-Presse.
À l’époque, Queniaux avait 34 ans et ne dansait déjà plus à l’Opéra de Paris. Elle faisait partie des courtisanes les plus prisées des milieux mondains et était en compétition directe avec Marie-Anne Detourbay pour gagner les faveurs de Halil Pacha. Alors… Queniaux ou Detourbay ? Le doute pourrait encore persister. Seulement voilà, comme le précise Aubenas : « les descriptions contemporaines des beaux sourcils noirs » de Queniaux correspondent au mieux aux poils pubiens du mannequin. La Bibliothèque nationale de France possédant plusieurs photographies d’elle, dont une du célèbre pionnier de la photographie, Nadar.
Autre argument probant, à sa mort, Queniaux a laissé dans son testament une peinture de camélias de Courbet, au centre de laquelle se trouve une fleur rouge… très ouverte. Des suites du roman de Dumas fils, La Dame aux Camélias, les camélias étaient associés, à l’époque, aux courtisanes. « Quel meilleur hommage de l’artiste et de son mécène à Constance ? » déclare Aubenas, en précisant que cette peinture pourrait être un cadeau de Halil.