L’université Lyon 1 a refusé la demande de deux étudiantes de transformer le terme « docteur » en « doctoresse » sur leurs diplômes respectifs. Cette histoire illustre, une fois encore, le difficile accès aux études supérieures pour les femmes, et leur manque de visibilité, plus particulièrement dans le domaine scientifique.
L’histoire aurait pu passer inaperçue. Pourtant, aussi anodine qu’elle puisse paraître, elle est primordiale dans la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
Deux doctoresses sans doctorat
Gwaldys Fernandes et Caterina Väclu ont travaillé dur ces dernières années pour obtenir leur doctorat en mathématiques fondamentales à l’université Lyon 1. En octobre 2019, elles passent leur soutenance de thèse et l’obtiennent. Mais elles n’ont toujours pas leur diplôme en main. Pour cause : elles sont demandé à féminiser leur grade, c’est à dire passer de « docteur » à « doctoresse » sur le papier. Mais la requête leur a été refusée.
« Le jury de thèse m’a décerné le grade de « doctoresse », affirme Vaterina Väclu à nos confrères de Numerama. Selon elle, le blocage ne vient pas du jury, mais de l’administration universitaire, puisque le refus concerne le rapport de thèse et le procès verbal. Sur ces deux derniers documents les membres du jury avaient automatiquement noté « doctoresse », mais l’établissement a demandé à ce que ces mentions soient remplacées par « docteur ». Les deux jeunes femmes doivent donc accepter de garder le terme masculin pour accéder à leurs diplômes afin de postuler à des postes professionnels.
Un combat féministe
Face à la situation, les deux jeunes femmes ont décidé d’exprimer leur mécontentement dans une lettre ouverte. Elles demandent à l’université d’accéder à leur requête afin de leur remettre leur diplômes le plus rapidement possible. La lettre ouverte a très vite suscité un engouement et des associations soutenant les femmes scientifiques ont écrit une lettre, non-publique, à Frédérique Vidal, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche afin de soutenir les deux jeunes femmes.
Sûres de leurs convictions, les deux ex-étudiantes sont bien décidées à ne pas revenir sur leur position : « Elles veulent exister comme femmes puisqu’elles sont femmes. Toute la communauté scientifique est derrière elles, sauf les personnes en situation de responsabilité », commente Colette Guillopé, mathématicienne et trésorière de l’association Femmes et Mathématiques.
La visibilité des femmes dans les sciences
Si la place et la visibilité réduites des femmes dans les études et métiers scientifiques n’ont rien d’une nouveauté, le fait que l’administration française bloque encore sur l’inclusivité des termes est une aberration : « Puisque je suis une femme, ça me parait complètement naturel de me désigner par des termes féminins. J’ai employé des termes reconnus par l’Académie française et déjà employés par différents milieux », s’offusque Gwaldys Fernandes.
Aujourd’hui, seulement 14% de femmes sont présentes dans le domaine des mathématiques fondamentales, selon les chiffres de l’association Femmes et Mathématiques.