« Nous sommes deux sœurs jumelles, nées sous le signe des gémeaux… ». Cette rengaine vous dit quelque chose ? Elle nous vient tout droit du film « Les Demoiselles de Rochefort » de Jacques Demy, sorti le 8 mars 1967 dans lequel Michel Legrand a excellé, encore une fois, à l’écriture des musiques. Disparu le 26 janvier dernier, à quelques jours de son 87e anniversaire, Michel Legrand a marqué le paysage du cinéma français, et il résonne encore aujourd’hui dans tous les foyers de France.
« Si je n’écris pas, si je ne joue pas, ma vie n’a plus de sens. La musique est en moi, elle m’accapare comme elle l’a toujours fait. Un musicien qui ne musique pas, c’est personne. Celui qui a inventé la retraite est un criminel. » disait Michel Legrand le 18 septembre dernier. Effectivement, le mot « retraite » n’entrait pas dans son vocabulaire. Les 17 et 18 avril prochain, il devait même se produire sur la mythique scène du Grand Rex, à Paris, avec Natalie Dessay, Michel Portal, Richard Galliano et Sylvain Luc pour rendre un hommage à Claude Nougaro.
Un artiste complet et insatiable
Il était de ces artistes nés, qui ne savaient pas s’arrêter de créer et qui n’étaient jamais rassasiés. C’est ce qu’on retiendra de Michel Legrand, tout comme les nombreux films auxquels il a participé et qui font désormais partie du patrimoine du cinéma national : « La Baie des Anges », « Les Parapluies de Cherbourg » et « Peau d’âne » de Jacques Demy, « L’Affaire Thomas Crown » de Norman Jewison, « La Piscine » de Jacques Deray… Il s’est également produit sur de nombreux disques, et dans de nombreux concerts ou spectacles avec des artistes comme Iggy Pop, Carla Bruni, Olivia Ruiz, Hélène Segara, Lambert Wilson, Thomas Dutronc ou encore Muriel Robin.
Une musique plurielle et multiple
Michel Legrand avait un credo : pour lui, la musique était « plurielle » et refusait toute hiérarchie entre les styles, du jazz à la variété en passant par la musique classique : « Depuis que je suis tout petit, mon ambition est de vivre complètement entouré de musique. Mon rêve est de ne rien manquer. C’est pourquoi je n’ai jamais opté pour une discipline musicale. J’aime jouer, diriger, chanter et écrire, et dans tous les styles. Je me tourne donc vers tout, pas seulement un peu de tout. Plutôt l’inverse. Je fais toutes ces activités à la fois sérieusement, sincèrement et avec un engagement profond. »
Le 31 décembre 2015 il recevait la Légion d’honneur par le Président François Hollande. Mais c’est aux États-Unis que le compositeur fut le plus récompensé puisqu’il reçu trois Oscars en 1969, 1972 et 1984 et fut treize fois nommé. Il ne remporta cependant aucun César, malgré trois nominations. À la fois compositeur, chef d’orchestre, pianiste, chanteur, joueur de jazz, accompagnateur et arrangeur, Michel Legrand était un musicien dans tous les sens du terme.
Peau d’âne, dernier grand chef d’œuvre
C’est avec « Peau d’âne » que Michel Legrand signe son dernier grand chef d’œuvre dans les salles obscures, en 1970. Bel écho et bel hommage, le film est actuellement adapté en pièce de théâtre au Théâtre Marigny, à la demande de Jean-Luc Choplin, nouveau directeur du théâtre Marigny : « Michel a trouvé le projet génial, a confié ce samedi Jean-Luc Choplin au journal Le Parisien. Il s’est plié à mes contraintes sans rechigner. Nous avons vécu une expérience joyeuse. Malgré une certaine fragilité, il a tenu à tout gérer avec énergie et enthousiasme, des arrangements au choix des musiciens à la production du disque ».
Pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus sur ce géant méconnu du cinéma et de la musique française, vous pouvez vous procurer son autobiographie, coécrite avec Stéphane Lerouge et intitulée « Rien n’est grave dans les aigus ».